Les 3 grands stocks de carbone sur la planète sont les forêts, l'océan et les sols... si des politiques et des mesures incitatives adaptées étaient mises en place dans le monde entier, les teneurs en matière organique des sols pourraient être rétablies aux niveaux de l'agriculture préindustrielle dans un délai de 50 ans, soit à peu près le temps que l'agriculture industrielle a pris pour les réduire. Cela permettrait d'éliminer entre 24 et 30 % du total des émissions mondiales actuelles de gaz à effet de serre. A l'approche de la COP21 (21e Conférence des parties de la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques) qui se tiendra à Paris en cette fin d'année 2015, chacun y va de sa préconisation... pourtant en matière d'agriculture, les prises de positions sont timides. Étonnant, quand l'on sait que plus de 50 % du total des émissions de gaz à effet de serre proviennent du système alimentaire mondial !
Les Etats Insulaires du Pacifique sont parmi les premiers concernés par les projets "d'adaptation aux changements climatiques", parfois chevaux de Troyes des engrais et des pesticides chimiques,
des semences hybrides, mutagènes ou OGM promus par les agences de développement rural ou gracieusement donnés par les missions d'aide humanitaires (lire notre dossier Cyclone PAM). Alors, pour mieux comprendre les enjeux qui se
jouent actuellement autour des négociations sur le climat, et en quoi les modèles agricoles que nous choisissons pour nos territoires peuvent "refroidir" ou"réchauffer" le climat, voici une
sélection d'articles et de campagnes. Si le débat est mondial, il doit toutefois impérativement être replacé dans le contexte régional et local. Quelle agriculture voulons-nous pour
demain ?
> Proposition pour la COP21 : l'agriculture, un enjeu primordial
> L’agriculture « intelligente » face au climat : cheval de Troie des OGM ? (Inf'OGM)
> Les EXXONS de l'agriculture (dossier A CONTRE COURANT, GRAIN)
> Ensemble, nous pouvons refroidir la planète ! (la Via Campesina)
La 21ème Conférence des parties de la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques de 2015 (COP21), aussi appelée « Paris 2015 », va se tenir à Paris du 30 novembre au 11 décembre 2015. C’est une échéance cruciale, puisqu’elle doit aboutir à un nouvel accord international sur le climat, applicable à tous les pays, dans l’objectif de maintenir le réchauffement mondial en deçà de 2°C.
Les 28, 29 et avril à Nouméa s'est tenu Oceania 21 qui est l'une des étapes pour la préparation de la position commune des états insulaires du Pacifique pour la COP21.
STOP OGM Pacifique souhaite attirer l'attention des délégations sur l'importance des décisions à prendre en matière de d'agriculture dans le Pacifique et pour le reste du
monde.
Entre 44 % et 57 % du total des émissions de gaz à effet de serre proviennent du système alimentaire mondial, à
travers :
La FAO affirme que l'avancée de la frontière agricole est responsable de 70 à 90 % de la déforestation mondiale, au moins la moitié étant destinée à la production de quelques produits agricoles
destinés à l'exportation.
La plupart de ces émissions proviennent de l'utilisation d'intrants industriels, comme des engrais chimiques et de l'essence pour faire fonctionner les tracteurs et les machines d'irrigation,
ainsi que des surplus de fumier générés par l'élevage intensif.
Une grande partie de notre nourriture, cultivée dans des conditions industrielles dans des contrées lointaines, parcourt des milliers de kilomètres avant d'atteindre nos assiettes. On estime que
le transport des denrées alimentaires représente un quart des émissions mondiales de GES liées au transport.
La transformation et le conditionnement permettent à l'industrie alimentaire d'empiler sur les rayons des supermarchés et des magasins de proximité des centaines de marques et de formats
différents, mais ils génèrent aussi une énorme quantité d'émissions de gaz à effet de serre.
la congélation et vente au détail : 2-4 %
La réfrigération est la clé de voûte des vastes systèmes mondiaux d'achat des chaînes modernes de supermarchés et de restauration rapide. Partout où le système alimentaire industriel s'implante,
il est accompagné de chaînes du froid. Si l'on considère que le refroidissement est responsable de 15 % de la consommation mondiale totale d'électricité et que les fuites de fluides frigorigènes
chimiques sont une source importante de GES, on peut dire sans risque de se tromper que la réfrigération des aliments représente environ 1 à 2 % du total des émissions mondiales de gaz à effet de
serre. La vente au détail des aliments représente 1 à 2 % de plus.
Le système alimentaire industriel met au rebut jusqu'à la moitié des denrées produites, jetées pendant le long trajet parcouru depuis les exploitations agricoles jusqu'aux commerçants, aux
transformateurs, et finalement jusqu'aux détaillants et aux restaurants. Beaucoup de ces déchets pourrissent sur des tas d'ordures et des décharges, et produisent d'importantes quantités de
GES.
Les petits agriculteurs et les communautés autochtones continuent à produire la plus grande partie de l'alimentation dans le monde : 80% des denrées alimentaires dans les pays non industrialisés selon la FAO. Les pratiques traditionnelles basées sur des savoirs-faire ancestraux et l'utilisation de semences et de variétés adaptées sont la garantie pour les peuples du Pacifique d'une plus grande résilience face aux changements climatiques.
Les délégations des Etats et Territoires insulaires se sont engagés dans la Déclaration de Lifou à
organiser une table ronde en août 2015 sur les savoir-faire traditionnels comme atouts en terme de résilience face aux changements climatiques. Nous appelons de nos vœux qu'une réflexion s'engage sur l'importance du soutien à l'agriculture traditionnelle et à la préservation des savoir-faire et de
l'agrobiodiversité, et de relayer cette position auprès des pays industrialisés qui seront présents à la COP21 en décembre.
1. Prendre soin des sols.
L'équation alimentation/climat plonge ses racines dans la terre. Le développement de pratiques agricoles non durables au cours du siècle dernier a conduit à la destruction de 30 à 75 % de la
matière organique sur les terres arables, et 50 % de la matière organique sur les pâturages et les prairies. Cette perte massive de matière organique est responsable de 25 à 40 % de l'excédent
actuel de CO2 dans l'atmosphère de la terre. Mais la bonne nouvelle est que le CO2 que nous avons envoyé dans l'atmosphère peut être remis dans le sol, tout simplement en rétablissant les
pratiques que les petits agriculteurs mettent en œuvre depuis des générations. Si des politiques et des mesures incitatives adaptées étaient mises en place dans le monde entier, les teneurs en
matière organique des sols pourraient être rétablies aux niveaux de l'agriculture préindustrielle dans un délai de 50 ans, soit à peu près le temps que l'agriculture industrielle a pris pour les
réduire. Cela permettrait d'éliminer entre 24 et 30 % du total des émissions mondiales actuelles de gaz à effet de serre.
2. Une agriculture naturelle, sans produits chimiques.
L'utilisation des produits chimiques dans les exploitations industrielles est en perpétuelle augmentation, (au fur et) à mesure que les sols s'appauvrissent et que les ravageurs et les mauvaises
herbes deviennent résistants aux insecticides et aux herbicides. Les petits agriculteurs du monde entier, cependant, disposent encore des connaissances et de la diversité des cultures et des
élevages nécessaire pour assurer une culture productive sans l'utilisation de produits chimiques, en diversifiant les systèmes de culture, en combinant production végétale et animale, et en
intégrant des arbres et une végétation sauvage. Ces pratiques améliorent le potentiel productif des terres parce qu’elles améliorent la fertilité des sols et empêchent leur érosion. Chaque année,
de la matière organique s'accumule dans le sol, ce qui permet de produire de plus en plus de denrées alimentaires.
3. Réduire les « kilomètres alimentaires », et privilégier les aliments frais.
La logique d'entreprise qui se traduit par des transports de denrées alimentaires autour du monde dans les deux sens, n'a pas de sens du point de vue de l'environnement, ni d'aucun autre point de
vue d'ailleurs. Le commerce mondial des produits alimentaires, qu'il s'agisse du défrichage de vastes étendues de terres et de forêts pour produire des produits agricoles ou des aliments surgelés
vendus dans les supermarchés, est le principal responsable de la contribution disproportionnée du système alimentaire aux émissions de GES. Une grande partie des émissions de GES du système
alimentaire peut être éliminée si la production alimentaire est réorientée vers les marchés locaux et les aliments frais, en tournant le dos aux viandes bon marché et aux aliments transformés.
Mais la bataille pour y parvenir est probablement la plus difficile, tant les grandes entreprises et les gouvernements sont profondément déterminés à développer le commerce des produits
agro-alimentaires.
4. Rendre la terre aux agriculteurs et arrêter les méga-plantations.
Au cours des 50 dernières années, quatre cultures principalement pratiquées dans de grandes plantations (soja, huile de palme, colza et canne à sucre) ont envahi une énorme superficie de 140
millions d'hectares, la taille de la presque totalité des terres agricoles en Inde. La superficie occupée au niveau mondial par ces quatre cultures industrielles et quelques autres, toutes bien
connues pour leurs émissions de gaz à effet de serre, est appelée à poursuivre sa croissance si les politiques ne changent pas. Aujourd'hui, les petits agriculteurs sont confinés dans moins d'un
quart des terres agricoles mondiales, mais ils continuent à produire la plus grande partie de l'alimentation dans le monde : 80 % des denrées alimentaire dans les pays non industrialisés, selon
la FAO. Les petits agriculteurs produisent ces denrées alimentaires beaucoup plus efficacement que les grandes plantations, et par des moyens qui sont meilleurs pour la planète. Une
redistribution des terres dans le monde entier au profit des petits agriculteurs, combinée à des politiques destinées à les aider à rétablir la fertilité des sols et à soutenir les marchés
locaux, peut permettre de réduire de moitié les émissions de GES en quelques décennies.
5. Oublier les fausses solutions, se concentrer sur ce qui fonctionne.
Il est de plus en plus largement reconnu que l'alimentation est au cœur du changement climatique. Les derniers rapports du GIEC et les plus récents sommets internationaux ont reconnu que
l'alimentation et l'agriculture sont les principaux facteurs d'émissions de GES et que le changement climatique pose d'énormes défis à notre capacité de nourrir une population mondiale
croissante. Pourtant, aucune volonté politique n'est venue remettre en cause le modèle dominant de la production alimentaire industrielle et de sa distribution. Au lieu de cela, les gouvernements
et les grandes entreprises proposent un certain nombre de fausses solutions. Il y a par exemple la coquille vide de l « 'Agriculture intelligente face au climat », qui est pour l'essentiel un
nouveau nom pour la Révolution verte. Il y a aussi de nouvelles technologies à risque, comme des cultures d'organismes génétiquement modifiés pour résister à la sécheresse ou des projets de
géo-ingénierie à grande échelle. Il y a encore des objectifs sur la part des biocarburants, qui entraînent un accaparement des terres dans les pays du Sud. Et il y a enfin des marchés du carbone
et des projets REDD +, qui permettent essentiellement aux pires émetteurs de GES d'éviter de réduire leurs émissions en transformant les forêts et les terres agricoles des paysans et des peuples
indigènes en parcs de conservation et en plantations. Aucune de ces « solutions » ne peut fonctionner parce que toutes vont à l'encontre de la seule solution efficace : le passage d'un système
alimentaire industriel mondialisé soumis au pouvoir des grandes sociétés à des systèmes alimentaires locaux aux mains de petits agriculteurs.
Source : Grain & La via campesina
Dossier complet à lire sur le site www.grain.org
EXTRAITS :
"On pourrait dire pour résumer que [les producteurs d'engrais] sont les compagnies pétrolières du monde de l'agro-alimentaire : les produits qu'elles amènent les agriculteurs à déverser dans le
sol constituent la plus grande source d'émissions du secteur agricole."
"A l'occasion de la COP21 [...] une seule initiative intergouvernementale majeure a émergé pour répondre aux enjeux du changement climatique et de l'agriculture, et elle est contrôlée par les
plus grands producteurs mondiaux d'engrais."
"L'Alliance mondiale pour une Agriculture intelligente face au climat, lancée l'an dernier au cours du Sommet sur le changement climatique des Nations Unies (ONU) à New
York, est l'aboutissement de plusieurs années d'efforts du lobby des engrais visant à bloquer toute action significative sur l'agriculture et le changement climatique. Sur les 29 membres
fondateurs non gouvernementaux de l'Alliance figurent trois groupes de pression de l'industrie des engrais, deux des plus grands producteurs mondiaux d'engrais (le norvégien Yara et l'Américain
Mosaic) et une poignée d'organisations travaillant directement avec les producteurs d'engrais sur des programmes consacrés au changement climatique. Aujourd'hui, 60 % des membres de l'Alliance
appartenant au secteur privé sont toujours issus de l'industrie des engrais."
"En quoi consistent donc ces programmes d'« agriculture intelligente face au climat » poursuivis par les membres de l'Alliance ?
La FAO, l'un des principaux organisateurs de l'Alliance, a établi un document de référence et une liste d'accompagnement qui mentionne dix « success stories » de l'agriculture intelligente face
au climat. Tous les exemples donnés sont des programmes de « vulgarisation descendante », notamment une technique d'application d'engrais azoté encouragée par l'IFDC, qui est destinée aux petits
agriculteurs dans les pays du Sud dont les contributions au changement climatique sont négligeables. Le CGIAR a présenté un ensemble similaire de « success stories » sur des initiatives
d'agriculture intelligente face au climat qui sont axées sur les pays du Sud et font la promotion de l'utilisation d'engrais et d'organismes génétiquement modifiés, mais ne mentionnent pas du
tout l'agroécologie. "
Télécharger et lire dans son intégralité ICI
A lire dans son intégralité sur le site d'Inf'OGM
EXTRAITS :
" Le but de cette agriculture intelligente face au climat est triple :" une augmentation durable de la productivité et des revenus agricoles (sécurité alimentaire) ; l’adaptation et le développement de la résilience face au changement climatique (adaptation / résilience) et la réduction et/ou l’éradication des émissions des gaz à effet de serre (atténuation), dans la mesure du possible". Ces objectifs sont assurément partagés par de nombreuses organisations… mais les différences sont dans le « comment » ? En effet rien n’est dit sur ce qu’il possible ou non de faire au nom de cette agriculture intelligente. L’absence de contours et de critères laisse la porte ouverte à n’importe quel projet, du moment qu’il est bien emballé sémantiquement… Mettez du durable, de la gestion des sols, de la reforestation… et vous aurez un projet éligible alors qu’il peut être tout à fait néfaste tant au climat qu’aux populations concernées.
"La FAO a présenté dix « success stories » (expériences réussies) et le CGIAR, qui participe activement à la mise au point de cette Alliance, en a présenté seize. Décrypter ces histoires merveilleuses nous permet de mieux cerner ce qui pourrait, à termes, bénéficier de cette appellation. Nous aurons l’occasion de les analyser en détail à l’occasion d’autres articles, mais nous tenons à souligner quelques éléments. Tout d’abord, aucun projet ne concerne directement l’agro-écologie. Plusieurs exemples concernent des variétés transgéniques, comme les plantes rendues tolérantes aux herbicides et aux ravageurs qui « renforcent la résilience climatique des systèmes agricoles et leur capacité à atténuer le changement climatique » ; des variétés hybrides, comme les maïs tolérants à la sécheresse développés avec l’argent de la Fondation Bill & Mélinda Gates et l’USAID... "
Lire dans son intégralité ICI
Egalement à consulter auprès de STOP OGM Pacifique, le nouveau mini-guide d'Inf'OGM :
Des OGM au secours du climat : une fausse solution
Les OGM peuvent-ils lutter contre les changements du climat et favoriser les cultures en conditions climatiques extrêmes ? Ce guide explique pourquoi les OGM "Climate-Ready" ne sont
pas une réponse durable au problème climatique actuel, mais au contraire une des causes des émissions de gaz à effet de serre (monocultures industrielles, utilisation de pesticides, transport sur
de grandes distances...).
À l’occasion de la Journée d’action mondiale pour la souveraineté alimentaire (16 octobre), Rosalía va nous raconter comment Tous et toutes ensemble, nous pouvons refroidir la
planète! La vidéo dévoile les liens entre le système d’alimentation agro-industriel et la crise climatique. Et des paysannes et paysans de différentes régions de la planète nous y
présentent des solutions à cette crise que nous pouvons appliquer ensemble.
Regardez la bande-annonce et passez le mot!